Jour 6 - Mardi 8 août 1972
GRAND CANYON
On est en Arizona. Une heure de moins.
Nous nous réveillons à 7h, de nous-mêmes, et prenons le petit déjeuner à 8h.
La journée est libre et nous apprécions cette liberté. Nous passons la matinée à faire nos achats de cadeaux dans les magasins très bien achalandés en souvenirs. Puis nous nous rendons aux Visitors' Bureau où nous obtenons carte et renseignements.
Nous allons alors commencer notre visite en stop car le parc est immense et à notre exception, les touristes qui circulent, sont en voiture... Notre premier chauffeur est une jeune femme qui nous conduit jusqu'au bord du canyon, à Bright Angel. C'est notre premier essai en stop aux États-Unis et nous n'avons pas attendu cinq minutes, ce qui nous encourage à continuer.
Nous avons à Bright Angel notre premier contact avec le canyon du Colorado et j'avoue que ce premier contact m'a déçu. Les couleurs étaient brûlées par le soleil, dans les verts et gris, alors que je m'attendais voir des roches rouges. Je faisais une confusion avec le Bryce Canyon que bien souvent on prend sur les photos des magazines pour le canyon du Colorado. Je n'avais pas non plus cette impression de relief à laquelle je m'attendais, le canyon me donnant plutôt une image de carte postale, où tout était aplati. La chaleur est étouffante et nous nous réfugions à l'intérieur du bâtiment climatisé où nous nous précipitons vers le distributeur de coke et écrivons toute une série de cartes postales.
Vers 14h 30 nous partons longer à pied le canyon. Cette route ou plutôt ce chemin tracé, il est d'ailleurs destiné qu'aux piétons. Peu à peu mon opinion sur le canyon change. Il y a davantage de contraste de couleur. Nous empruntons des jumelles pour observer les roches et nous apercevons même le Colorado, une mare minuscule, sale verdâtre, boueuse, avec un pont, et qui en fait, nous l'apprendrons le soir par ceux du groupe qui ont entrepris la descente du canyon dans la journée, est un fleuve immense, bouillonnant, de 300 m de large, tortueux, charriant des troncs d'arbres, et ce fameux pont miniature, en vrai il est immense.
Nous longeons ainsi le canyon toute l'après-midi, croisant des touristes américains venant en sens inverse. Puis nous empruntons un petit chemin rocailleux sans prêter attention au fait que nous ne croisons plus du tout personne. Nous sommes seules, le chemin devient de moins en moins tracé et nous commençons à peiner car il grimpe et redescend sans cesse et nous nous buttons contre les cailloux. À la fin, nous en avons assez, et nous rejoignons la route qui est parallèle au chemin pour piétons, et nous retentons le stop.
Ce sont des Indiens en Chevrolet qui nous emmènent. Nous apprécions de nouveau le vent au milieu de cette chaleur torride. Nous avons parcouru une certaine distance quand notre chauffeur descend de la voiture et vient pour vérifier sur notre carte l'endroit où nous désirions aller, et il nous apprend qu'en fait nous roulons en sens inverse. Il s'était passé que, en empruntant ce petit chemin pénible et non tracé, nous étions allés au-delà du Musée Indien qui marque la fin de la promenade pour touristes le long du grand canyon. Et nous nous étions éloignés encore davantage du centre des General Stores.
Nous refaisons donc du stop, en sens inverse, et c'est une famille très sympathique de touristes américains en vacances qui nous emmène. Margot, Jerry, et leurs deux fils, sont du New Jersey. Ils nous demandent bien sûr nos impressions de voyage et comme nous nous plaignons de ne pas avoir assez de contacts avec les Américains, ils nous donnent leur adresse et celle de leur tante de San Francisco, nous saurons un peu plus tard qu'elle adore recevoir des Français. Ils nous conduisent jusqu'aux General Stores et nous rejoignons nos bungalows.
Nous nous apercevons alors que depuis ce matin nous vivons avec une heure d'avance. Les événements de la veille ont fait que notre chauffeur a oublié de nous signaler le décalage horaire comme il le faisait toujours. Nous pensons au couple de Français que nous avons rencontré à Bright Angel et qui nous ont quitté, affolés, certains d'avoir raté leur bus.
Et dire que nous nous sommes levés à 6 hres ce matin, par un jour de repos !
Nous refaisons du stop pour rejoindre le Post Office devant lequel nous devons assister à des danses indiennes. C'est un couple d'Anglais avec leurs enfants qui nous emmène. Ils ont une voiture immatriculée au Canada qui est celle du frère de la jeune femme chez qui ils sont en vacances au Canada. Le mari parle Français et est enchanté de pratiquer cette langue avec nous.
Nous tournons à la recherche du Post Office et nous nous retrouvons devant l'hôtel où loge Mrs Margot et sa famille. Nous nous renseignons auprès d'un couple qui s'empresse, découvrant que nous sommes françaises, de nous faire la conversation, et eux aussi de nous demander nos impressions.
Nous arrivons devant le Post Office et nous assistons à la préparation de la soirée. Nous sommes assez surprises de voir qu'en fait d'indiens, c'est un orchestre de noirs, plutôt New Orleans que Hopi. Nous attendons cependant patiemment assises sur les marches du Post Office.
Heureusement un membre de l'orchestre nous voyant attendre ainsi, s'approche de nous, et nous découvrirons qu'au lieu des danses indiennes que nous attendions, c'est simplement le début d'une "street dance" c'est-à-dire un bal en plein air. Les danses indiennes n'avaient plus lieu à cette époque au Grand Canyon, les Indiens étant repartis dans leurs réserves.
Nous nous accrochons alors au deuxième but que nous avions pour cette soirée : assister au coucher du soleil sur le canyon. Nous nous précipitons à Bright Angel pour découvrir le canyon plongé dans un brouillard épais. Le brouillard ne recouvrait pas le sommet des rochers mais tout le fond du canyon, et le vent était très violent. Cette fois-ci le canyon était devenu très impressionnant et nous pensions au groupe qui était descendu depuis ce matin au fond du canyon et qui n'était toujours pas remonté.
Nous faisons du stop pour retourner à notre bungalow et nous montons dans un voiture avec deux gars un peu hippy, de Denver, Colorado, en vacances au canyon. L'un d'entre eux parlait un américain qui me fut totalement incompréhensible.
Aux General Stores nous mangeons un hot dog et des frites, tout cela agrémenté d'un milk-shake à la fraise, et nous rejoignons notre groupe avec qui nous discutons un moment devant les bungalows. Nous nous inquiétons pour ceux qui étaient descendus au fond du canyon et pas encore rentrés.
Enfin, par petits groupes, ils arrivent, exténué de fatigue, mais content d'être descendu. À 23 hres arriveront en taxi les dernières filles du groupe qui avouèrent avoir sérieusement souffert de la soif, de la fatigue, de la chaleur, et des pieds, durant cette descente.
