
RETOUR
L'HISTOIRE DU MYANMAR
Je cite ici le site : http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/birmanie.htm
3 Données historiques
L’histoire de la Birmanie a toujours été marquée par l’influence culturelle et religieuse de l’Inde mais aussi par des guerres et les répressions sanglantes. Le premier empire birman unifié fut fondé au XIe siècle par les Môns. Puis, au XIIIe siècle, le royaume môn tomba aux mains des armées mongoles. Une partie de la Birmanie subit ensuite la domination des Shans, ensuite à nouveau celle des Môns. Mentionné sous le nom de Myanmar (le «pays merveilleux») dans les récits de Marco Polo au XIIIe siècle, le pays s’appela ensuite Bamar du nom du peuple bamar (en birman, le [r] ne se prononce pas).
Au début du XIXe siècle, les Britanniques déclenchèrent la première guerre anglo-birmane (1824-1826) qui leur laissa le contrôle d’une partie de la Birmanie. Ils changèrent le nom de Bamar en Burma, que les Français traduiront plus tard par Birmanie. À l'issue d’une seconde guerre anglo-birmane (1852-1855), toute la Birmanie fut annexée et proclamée en 1886 comme province de l'empire des Indes, non sans avoir massacré des populations entières.
3.1 La colonisation britannique
Les Britanniques se sont mis à coloniser le pays en imposant militairement la loi et l’ordre, en administrant la justice d’une manière expéditive, en supprimant la religion et la langue des populations autochtones pour favoriser exclusivement la langue anglaise. Les habitants du pays réagirent très mal à la colonisation maladroite des Britanniques. La capitale coloniale était Pyinmana, située au centre du pays, ce qui permettait aux Britanniques de mieux contrôler toute la région.
La résistance s’organisa et, après un demi-siècle de colonisation, des mouvements nationalistes surgirent partout dans le pays à un point tel que, lors de la Deuxième Guerre mondiale, les Britanniques perdirent rapidement le contrôle de la Birmanie au profit des Japonais. Finalement, au lendemain de la guerre, la Birmanie proclama son indépendance, le 4 janvier 1948, et refusa de faire partie du Commonwealth.
3.2 Après l'indépendance
Après l’indépendance, l’Union birmane connut une relative prospérité, troublée seulement par les incessantes exigences des Karens et des Shans. En 1962, le général Ne Win s'empara du pouvoir à la suite d’un coup d’État et instaura un régime centralisateur fort; il refusa aux minorités le droit à la sécession. La politique du parti au pouvoir, qui s’était engagé dans la «voie birmane du socialisme», entraîna une catastrophe économique sans précédent et fut accompagnée d'une diminution draconienne des libertés personnelles. Les principaux secteurs de l'économie furent étatisés. La nouvelle Constitution socialisante de 1974 transféra le pouvoir du parti unique du Conseil révolutionnaire militaire à une Assemblée du peuple dirigée par le général Ne Win et d'autres anciens dirigeants militaires.
En 1988, un nouveau coup d'État militaire se produisit et la loi martiale fut instaurée à la suite de répressions sanglantes. Dès ce moment, le conseil d'État pour le rétablissement de la loi et l'ordre (le SLORC) se mit en place et rebaptisa le pays sous le nom de Myanmar (le «pays merveilleux»). En 1989, le pays prit le nom d'union de Myanmar.
Les élections législatives de mai 1990 virent la victoire écrasante du parti d'opposition, la Ligue nationale pour la démocratie, dirigé par Mme Aung San Suu Kyi (fille de Aung San, l’un des héros de l’Indépendance), mais le SLORC refusa la tenue de la convention de l'Assemblée du peuple et poursuivit sa politique de répression et de nettoyage ethnique.
3.3 Un état répressif
Depuis que les militaires exercent les pleins pouvoirs en Birmanie, le général en chef des Forces armées (la Tatmadaw) exerce l'autorité législative et exécutive avec l'aide d'une Assemblée constituante de 485 membres en principe élus. Le tribunal le plus important est le Conseil des juges du peuple, puisque tous les tribunaux civils ont été suspendus. La junte au pouvoir muselle les médias, emprisonne les journalistes étrangers et interdit toute forme d'expression dissidente. Madame Aung San Suu Kyi, dirigeante de la Ligue nationale pour la démocratie et prix Nobel de la Paix en 1991, est toujours assignée à résidence après avoir été emprisonnée. Les militaires du SLORC répriment dans le sang (10 000 morts en 1988, des milliers depuis) les manifestations en faveur de la démocratie.
La communauté internationale reconnaît la violation des droits de l'homme en Birmanie et prend des sanctions économiques à son encontre. Les journalistes étrangers connaissent des difficultés croissantes: restrictions des conditions d'attribution des visas, confiscation sur place de leur matériel, de leurs films ou cassettes, sans compter les nombreuses expulsions. Le SLORC conserve des archives sur les journalistes étrangers et leur refuse le visa si leur dossier n'est pas "satisfaisant". Quant aux journalistes birmans jugés «non patriotes» pour avoir rédigé des «articles partiaux fondés sur de fausses accusations», ils sont détenus à la prison d’Insein à Rangoon, lieu réputé pour les terribles conditions qui y règnent et où la torture y est une pratique courante. Pour la presse internationale, la Birmanie est maintenant dirigée par une véritable narcodictature.
3.4 Une narcodictature
De fait, les dirigeants militaires birmans se sont résolument lancés dans le lucratif commerce international de la drogue, plus précisément l’héroïne, espérant ainsi rehausser le niveau de l’économie. L’objectif semble réussi, car la Birmanie est devenue le premier pays producteur d'opium et d'héroïne du monde, et fournit la moitié de la production mondiale d’héroïne. La plupart des régions de production du pavot sont situées dans des zones contrôlées par l'armée nationale ou par les milices qui ont signé des accords avec Rangoon; les généraux entretiennent tous des rapports étroits avec les barons de la drogue. La Chine est devenue un pays de transit qui a détrôné la Thaïlande et le gouvernement de Pékin renouvelle régulièrement des ventes d'armes à la Birmanie, à des conditions financières particulièrement favorables. Les revenus de ce trafic permet au SLORC d’augmenter les effectifs de l’armée – 45 % du budget de l’État est consacré à l’armée – et de contrôler, par exemple, l’État shan pour réaliser ses grands projets hydro-électriques et annihiler les Shans du pouvoir local. Il suffit d’étendre cette pratique aux autres États ethniques du pays pour contrôler ainsi les minorités.
Bref, le régime birman, acculé à une rare brutalité, exerce de plus en plus une répression impitoyable envers ses populations, que celles-ci soient birmanes ou non birmanes (minorités ethniques). Pire: le régime a élevé la corruption en un système économique dans lequel se côtoient affairistes et investisseurs étrangers (chinois, américains, français, thaïlandais, etc.). La narcodictature militaire tient fermement le pays par une répression accrue, mais les signes de tension dans la population se multiplient.
3.5 La nouvelle capitale
La ville de Rangoon, avec ses 5,3 millions d'habitants, forme une grande métropole peuplée de Birmans et d'ethnies minoritaires. La majorité des habitants est hostile au régime militaire qui gouverne le pays. C'est pourquoi, afin d'assurer ses arrières et sa sécurité, le gouvernement a commencé en novembre 2005 à déplacer les bureaux de l'administration centrale de Rangoon vers l'ancienne capitale britannique, Pyinmana. Cette ville, de près de 85 000 habitants, est située à quelque 380 km au nord de Rangoon, dans une zone étroite entourée de montagnes. Ainsi, la junte militaire se protège en se mettant «à l'abri» de la population de Rangoon qu'elle craint. Des fortifications souterraines y auraient déjà été construites. La nouvelle capitale présente aussi comme avantage pour la junte d'être située plus à proximité des frontières de la Chine et de la Thaïlande, lesquels constituent, on le sait, ses principaux soutiens extérieurs. De plus, en cas de danger, les membres du régime pourraient s'enfuir plus rapidement vers l'un ou l'autre de ces pays.
Cependant, le déplacement d'une capitale est toujours un exercice très coûteux, surtout pour un pays pauvre comme Myanmar. Afin de minimiser les coûts, seuls les principaux ministères (Intérieur, Défense, Affaires étrangères, Transports, Énergie, Agriculture, Information, etc.) et le gouvernement lui-même sont transférés Pyinmana. Le transfert de la capitale permet également le recyclage de l'argent sale provenant du trafic de la drogue grâce à l'achat et la vente des terrains, la construction des bâtiments, d'un aéroport, etc. Dans l'éventualité où la junte militaire perdrait le pouvoir au profit d'un gouvernement civil et démocratique, il serait probable que Rangoon redeviendrait la capitale du pays, afin de correspondre à la tradition historique. Le transfert de la capitale devait s'achever en 2006. Lors de l'inauguration, le 27 mars 2007, le nom de Pyinmana a été changé en Naypyidaw, signifiant «Cité royale».
En 2011, la junte militaire a officiellement cédé la place à un pouvoir civil dirigé par l'un de ses anciens membres. Cependant, le poids de la hiérarchie militaire demeure encore prépondérant.
4 La politique linguistique socialiste de 1974
La Constitution adoptée à l'accession à l'indépendance de la Birmanie en 1948 fut abolie lors du coup d'État de mars 1962. À partir de 1974, une nouvelle Constitution régit le pays en tant que république socialiste, jusqu'au coup d'État militaire de septembre 1988. Ainsi, cette constitution n’est plus appliquée aujourd’hui, mais elle n’a jamais été abrogée et remplacée par une autre. Depuis 1996, le SLORC poursuit sa convention nationale pour rédiger une nouvelle constitution – qui traîne depuis des années – visant à donner un rôle politique permanent et majeur aux militaires qui gouvernent la Birmanie et, semble-t-il, à offrir une autonomie assez grande aux fortes minorités ethniques de l'Union birmane pour que celles-ci ne rompent pas les cessez-le-feu provisoires passés avec l 'armée ces dernières années.
En attendant, la Constitution de 1974 demeure donc théoriquement en vigueur et suppose une politique linguistique de statut différencié à l’égard des minorités nationales. L’article 198 précise que le birman est la langue officielle et que la langue d’une ethnie nationale peut être aussi utilisée.
Extrait de ☞ http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/birmanie.htm
