L'ÎLE DE GORÉE
DE TOUBAB DIALO À DAKAR | VISITE DE GORÉE |

Image d'Internet - © portdakar.sn
C'est le navigateur portugais Dinis Dias qui atteignit le premier l'île de Gorée en 1444, qu'il baptise "Palma". Les Hollandais s’en emparent en 1588 et la baptisent "Goede Reede" (ce qui signidie "la bonne rade", "Good Rade") : Gorée se trouvant au centre de la rade que forme la côte sud de la presqu'île du Cap-Vert, elle est à l'abri des vents atlantiques, et constitue un abri sûr pour le mouillage des navires. C'est le nom qui lui aurait donné son nom actuel.
Les Français s'implantent sur l’île le 1er novembre 1677, mais les Anglais leur disputent cette position jusqu'à la paix d'Amiens en 1802. L'île fut occupée par les Anglais de 1804 à 1817 puis rendue à la France.
Si pendant deux siècles Gorée a été un centre, parmi d'autres, de la traite du bois d'ébène, l'île est devenue le symbole de la négritude humiliée.
Dès les premiers pas sur la plage, je suis sous le charme.
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Le fort d'Estrées a été achevé par les Français en 1856 pour protéger les abords de Dakar.
Il renferme le musée historique du Sénégal.

Face à moi, l'Hostellerie du Chevalier de Boufflers, l’hôtel le plus côté de l’île,
malheureusement mal entretenu d'après les échos des voyageurs.

Son nom vient du nom du Chevalier de Boufflers, Stanislas-Jean de Boufflers (1738 - 1815) qui fut le gouverneur colonial du Sénégal et de l'île de Gorée entre 1785 et 1787 (sous Louis XVI), dont la vie a inspiré Bernard Giraudeau qui en a tiré un magnifique film "Les Caprices d'un Fleuve". Avec Bernard Giraudeau et Richard Bohringer.
Stanislas-Jean de Boufflers
(Lunéville, 1738 - Paris, 1815)... Chevalier, puis Marquis de...)
Militaire et poète français, Chevalier de l'Ordre de Malte, fils du marquis de Boufflers et de Marie-Christine de Beauveau, amie du roi de Pologne Stanislas Leczinski. Il accepta en 1785 le gouvernement du Sénégal et de l'île de Gorée, que lui proposait le Marquis de Castries, ministre de la Marine de Louis XVI. |
On arrive sur une jetée construite sur la plage.

Quand on arrive au débarcadère de Gorée, un géant nous attend : il s‘appelle NATO et il cherche Olivier. C’est lui notre guide à Gorée, suite à une filière que je n’ai pas du tout comprise. Super guide, très distingué, très sympathique et empli de culture. On le rémunère à 5/6000 CFA pour la journée, pour tout le groupe.
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Visite de l'île

Nous faisons un arrêt, tout de suite sur la place centrale, tout de suite après le débarcadère.
Un jardin public ! cette place était la place du marché où l'on vendait les esclaves...

On imagine le passé. Cependant aujourd’hui les historiens récusent l’idée que Gorée ait été un lieu d’embarquement important, car les ports principaux se trouvant à Jurureth en Gambie et au Ghana. L’île était trop petite et des récifs en troublaient l’accès.
Sur la place, les enfants jouent au football : les "Lions" du Sénégal de la prochaine génération...

Pas de voitures, pas de bicyclettes
Gorée est un havre de paix : pas de voitures, pas de bicyclettes, seulement 1000 habitants, de hauts murs, des maisons de style colonial, d’où débordent les bougainvillées et autres magnifiques gerbes de fleurs tropicales.

Des maisons coloniales du 18 ème siècle
Des maisons coloniales du 18 ème siècle aux façades ocres, roses, jaunes et aux volets bleus
"On marche sous des baobabs ventrus et des manguiers élancés, on frôle des bougainvillées exubérants et des jasmins odorants, on zigzague entre des jarres de terre colorées ou de simples boîtes de conserve fleuries"...
"Une vieille demeure aux balcons de bois, comme des tableaux de peinture avec des femmes qui semblent être des statues venues d’un autre temps".


Je tombe sur... "Natacha" ! Elle, connaît le parcours de visites des touristes par coeur.
« Tu viens me voir » me dit-elle !... « Mais je dois suivre le groupe » lui dis-je... « OK, après »...
On continue la découverte.
Les canons de Navaronne
Nous montons vers la partie la plus élevée de l’île, le Castel. Surplombant l'île sur sa pointe sud, le Castel constituait une position stratégique. C'est un plateau rocheux recouvert de fortifications. En 1935, deux canons de 240 du cuirassé Vergniaud ont été hissés au sommet.
Nato nous explique que c'est à Gorée et avec ses canons que fut tourné le film de J. Lee Thompson "Les canons de Navaronne" sorti en 1961, avec Gregory Peck, David Niven, Anthony Quinn et Irène Papas...
Oui, je l'ai vu, moi, le film.
Durant la Seconde Guerre mondiale, les Allemands ont installé deux énormes canons sur l'île de Navarone, au large de la Turquie. Ces armes puissantes sont braquées sur l'île voisine de Kheros, rendant impossible l'évacuation des 2000 soldats de la garnison britannique. Ces hommes assiégés se retrouvent dans une situation critique. |
L'état-major confie alors à un commando d'élite la délicate mission de détruire ces deux redoutables cerbères. Les six hommes, parmi lesquels un alpiniste et un spécialiste des explosifs, doivent, pour s'approcher de leur objectif, neutraliser la vedette de surveillance avant d'escalader la falaise qui protège les canons...
Nato nous montre un précipice sur la mer : c’est là qu’a été tourné la chute des canons.
D’ailleurs, les fameux canons, ils sont à deux pas, et n’ont pas bougé de Gorée.
De là-haut, un large panorama sur le continent (on aperçoit très bien les gratte ciels de Dakar de l’autre côté de la mer) et on a une vue plongeante sur la bourgade.
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De par les rues
Puis nous déambulons par les rues fleuries, les maisons roses crevette.

"Entre les murs crépis de maisons dont les nuances ocre et jaune safran hésitent entre la décrépitude désargentée et l’opulence discrète. Si certaines demeures camouflent leur opulence derrière des murs discrets, ainsi celle du financier Georges Sorros, d’autres exhibent encore crânement les restes d’une architecture royale comme l’ancien Palais des Gouverneurs dont les terrasses monumentales regardent vers les Amériques. Sous les anciens jardins à la française, d’antiques soupiraux accompagnent chaque respiration de l’océan qui mortelle les fondations. De majestueux escaliers de pierre dorée conduisent à l’étage où courent des arcades élancées et décrépies"... Ouahoo !...

Là, une maison où est peinte sur le mur une géante effigie d'Ahmadou Bamba.
La même effigie que l’on a vue peinte sur de nombreuses maisons de pêcheurs au Sénégal.

Nous passons devant une rue... Saint Charles (la rue Saint Charles du 15 ème a bien voyagé...)

La Maison des esclaves
Nous entrons dans l’église, puis marchons jusqu’à la Maison des esclaves, le lieu le plus célèbre de l’île.
On arrive à une heure fixe car c'est à deux horaires sans une minutes de retard, que le conservateur de la Maison des esclaves, prononce sa "conférence" tous les jours avec traduction simultanée en anglais. Mais le ton théâtral à en effrayer plus d’un, semble avoir été astiqué pour faire monter les larmes aux yeux des touristes américains qui viennent nombreux.
La maison des esclaves, aurait été la dernière esclaverie en date de Gorée, les premières remontant à 1536, construites par les Portugais qui furent les premiers à fouler le sol de l’île en 1444.
Elle fut construite en 1796 dans la rue Saint Germain, par Nicolas Pépin, frère de la Signare Anne Pépin, elle-même maîtresse du Chevalier de Boufflers.

Maison de la signare Anna Colas à Gorée peinte par d'Hastrel de Rivedoux en 1839
On entre dans une petite cour au milieu de laquelle prône un imposant escalier, double et majestueux, qui conduisait aux appartements des maîtres au premier étage. J’y étais allée, bien sûr en 1980, et je m’en souviens encore.

En dessous, tout autour de la cour, des cellules étriquées (on dit qu'elles mesurent 2,60 m sur 2,60 m, et qu'on y mettait jusqu’à 15 à 20 personnes), où les esclaves attendaient d'embarquer pour les Amériques. Ils quittaient la maison par une porte qui s'ouvrait directement sur le large et les navires négriers en attente. L’attente de départ durait parfois près de trois mois. On raconte que les esclaves n'avaient pour toute vue que la mer devant eux.
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Le lieu est plus symbolique qu’historique car les centres concentrationnaires des esclaves africains en partance pour l’Amérique se situaient surtout à Saint-Louis, point de convergence de la traite négrière arabo-musulmane et européenne.
La traite des esclaves a perduré pendant trois siècles sur les côtes africaines (Gambie, Saint-Louis du Sénégal, Bénin, Ghana). Le passage des esclaves par Gorée fut très minoritaire : entre 900 et 1 500 personnes.
On dit que la "Maison des esclaves" de Gorée n’a pu, en fait, n’accueillir qu’un nombre relatif de captifs, entre 150 à 200, qui étaient ceux du maître de maison, et quelques autres qui attendaient d’être vendus.
Cependant, l'île de Gorée a joué un rôle important dans la traite, par la présence des captiveries françaises et le nombre d'esclaves déportés (environ 500 par an entre 1726 et 1755, et 15 476 entre 1761 et 1848).
L'abolition de l'esclavage date de 1848.

Nous remontons la rue vers la place principale.
Une fresque moderne dans une rue représente l'espoir d'un monde meilleur.

Le restaurant "Chez Tonton"
Je mange bien sûr du poisson. Natacha apparaît comme par... miracle ! Une femme portant un plat de bananes sur la tête attire mon regard, et je n’ai pas encore sorti l’appareil qu’elle me fait signe qu’elle l’a vu.
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L’après-midi je me suis promenée seule par les ruelles
Tout de suite j'ai suivi Natacha pour lui acheter quelque chose. Il n’y avait pas grand-chose dans son échoppe qui me plaisait vraiment. Je lui ai acheté trois colliers gri-gri (les fameux cauris) et 3 m de tissus pour 5000 CFA.
Ensuite je me suis fait harponnée par "les copines" de Natacha !
« Viens-voir ma boutique, tu vas bien m’acheter quelque chose ma copine »... Ah çà, qu'est-ce quj’ai été appelée de "ma copine" ! Alors, à Françoise... un paréo et un collier pour 2500 CFA.
Je les lâche et marche au travers des rues, très chaudes, et je prends des photos.

Je profite même des "toilettes publiques" bien sales, avec en plus une petite araignée dans le trou des WC.
Une maison d’hôtesJe tombe par hasard sur une maison d’hôtes, et je demande à y entrer et j’en prends la carte : ça a l’air très bien, un logement chez l’habitant, autour d’une cour fermée de la rue par des murs, une salle de bain commune. |
ASAO -
(Chambres d’hôtes) |
Cyber-café
Puis, je repasse pour la énième fois devant cette maison où je voyais des enfants devant des ordinateurs. Je n’avais pas osé y entrer, pensant que c’était une école, mais je réalise que c’est un cyber-café. J’en profite donc, surtout qu’il fait très chaud. C’est bon marché : 500 CFA l’heure. Je peux même acheter seulement 1/2 hre et je paye la moitié, 250 CFA. Il y a à l’écran une fenêtre qui apparaît et qui alerte « il vous reste 10 mn » … « il vous reste 5mn »… « il vous reste 3 mn » C’est la première fois que je vois ça et c’est bien pratique.
La plage
Ensuite je fais un tour très rapide dans le marché officiellement artisanal, trop arnaque, et je continue par la minuscule plage de l’embarcadère. J’ai bien mon maillot, mais toute seule, je me vois mal laisser mon sac, mes affaires, mon appareil photo et mon argent/passeport, sur la plage pour pouvoir me baigner. Donc, pas de baignade alors que plein de gens se baignent. Elle est petite la plage mais si moche que ça.

Je dépasse la plage et marche vers le Fort d'Estrée. Je regarde la chaloupe de 14h 30 décoller de la jetée. Je me dirige vers l'Hostellerie du Chevalier de Boufflers.
Je distribue des bonbons aux enfants : il m’en reste encore quelques-uns et... je quitte le Sénégal ce soir. Je retombe sur la femme aux bananes. On rit bien, et je lui offre ce qui me reste : des sachets de thé, des bonbons et des petits savons. Elle, elle ne refuse pas le thé.
Puis je me retrouve au café avec les autres. Voulant boire quelque chose, impossible, parce qu’ils n’avaient pas de monnaie.
Le retour vers Dakar
On prend la chaloupe de 16h 30. Il y a beaucoup de monde, car comme on est samedi, la prochaine chaloupe ne quitte Gorée qu’à 19h 00, ce qui nous faisait tard : pour nous, car on a l’avion ce soir, on veut se doucher, refaire les sacs et aller dîner... On trouve tous des places assises, et groupées.
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Il y a une tradition au départ de la chaloupe que tout petit garçon de Gorée a connue dans son enfance. Les passagers de la chaloupe jettent des pièces de monnaie du haut du bateau dans la mer, et les gamins plongent à la recherche des pièces. Ils ressortent bien souvent avec la pièce entre les dents.
Je jette toutes les pièces que je possède : les gamins plongent : quel spectacle ! quels nageurs ! Est-ce que ça porte bonheur ?

Pour la deuxième fois que je vais à Gorée, je n’aurai pas encore réussi à y dormir. Et pourtant :
C’est le soir que l’île est la plus belle. Les touristes sont repartis avec la chaloupe de 16h30, les venelles sont désertes et les crépis déclinent toutes les nuances d’ocre, selon qu’ils sont neufs, écaillés ou qu’ils laissent apparaître la pierre.
Je rêve de passer au moins une soirée à Gorée. "Le temps d’écouter les tourterelles qui animent l’espace, de humer les parfums floraux exacerbés par le crépuscule et le dîner sur la plage".
Eh bien, il faudra que je revienne : jamais deux sans trois.

On quitte l'île. La dernière image de Gorée.
Dernière image de la terre qui s’éloigne et de ses magnifiques demeures du bord de l’eau.
