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BILAN DU VOYAGE

Ce voyage a été magnifique non seulement par la beauté du pays et la grande diversité des attraits touristiques, mais surtout par les rencontres, les échanges, les discussions, que nous avons eues avec les Iraniens.

Ils nous ont demandé de parler d'eux et d'elles. Ils nous ont dit "Il faut que vous nous aidiez en Occident".

Et j'ai énormément, énormément, de choses à raconter.

Ils sont 20 % à être partisans du régime actuel, et 80 % contre. Certains ont la nostalgie de l'époque du Shah. Sur ces 80 % une partie crève la faim. On a vu des mendiants dans les rues, surtout des femmes, en tchador noir, assises sur les trottoirs, à Kerman et à Tabriz.

On nous a dit qu'au sud de Téhéran des femmes se prostituent en grand nombre.

On nous a dit que les jeunes avaient des relations sexuelles en cachette parce que c'est interdit en dehors du mariage.

Mais Internet a tout changé. Les Iraniens sont privés de liberté mais ils ont des idées. C'est grâce à eux que j'ai téléchargé une appli VPN qui m'a permis d'ouvrir Facebook et Blogger. Parce que sans ce VPN, je ne voyais sur mon écran qu'une page écrite en persan.

J'ai téléchargé WhatsApp, Telegram, et quoi encore... Share it, MyAppleShare... Cafébazar... Hotspot Shield... Des trucs que je n'aurais jamais osé installer sur mon téléphone lorsque j'étais en France, que je ne connaissais même pas. Eux, ils ont tous les réseaux d'échange sur leurs téléphones. Le e-mail, ils ont oublié ce que c'était...

Ce voyage, comment le qualifier ?

Quel mot employer ? Extraordinaire, hors du commun ! En tout cas il ne ressemble à aucun autre de mes voyages passés.

Des paysages sublimes. Des déserts du Sud aux montagnes du Nord qui bordent l'Azerbaïdjan, des villages traditionnels accrochés aux flancs des montagnes, des pics très hauts encore couverts de neige, et la mer Caspienne.

Une richesse artistique colossale. Au moins le régime islamiste n'a pas détruit. C'est toujours ça.

Je rêvais de Persepolis, je l'ai vu. Mais j'ai aussi vu Esfahan, Shiraz, Téhéran, les mosquées, les mausolées des imams, des poètes, les palais des Shahs, les églises arméniennes, le musée de Téhéran qui si l'on dit qu'il n'est pas le Musée du Louvre vaut son pesant d'or.

L'Iran est un pays moderne

Les routes même au milieu du désert sont nickel.

Les gens (fortunés) ont des maisons ou appartements avec le confort domestique semblable à l'Occident. Cependant dans de nombreuses maisons il y a les WC turcs, parfois deux toilettes des turques + des occidentales.

Il y a à Téhéran, cette ville détestée pour ses embouteillages et sa pollution, des quartiers très résidentiels, au calme, avec beaucoup d'arbres. D'ailleurs il y a énormément de grands parcs dans Téhéran, et dans les grandes villes.

Les Iraniens sont des "cerveaux". Ils font des études très poussées, souvent ingénieurs, architectes, mais ils ne trouvent pas de travail correspondant à leur niveau professionnel car "qui" trouve du travail doit s'acoquiner au régime. Alors ils deviennent professeurs en langue étrangère, ou professeur d'aikido (j'en ai rencontrée une !).

Le fameux "foulard" : un acte de résistance

Comme vous savez, c'était le "hic" qui m'a empêché d'y aller plus tôt. Je n'y arrivais pas à me l'imposer ce satané foulard. Faire porter le foulard à la femme non musulmane que je suis... quelle absurdité ! Et j'ai franchi le pas pour pouvoir y aller avant que l'Iran ne devienne une destination de tourisme de masse (C'est en marche, je peux vous l'assurer, ils sont beaucoup qui se forment pour devenir guide, pour ouvrir une agence de tourisme, ils apprennent l'anglais pour travailler dans le tourisme...)

Au début j'ai porté le truc ne laisse apparaître que l'ovale du visage. J''avais choisi ça tout simplement parce que je trouvais ça pratique : il ne glisse pas comme le foulard, car je m'emmêlais avec les cordons de mes sacs, appareil photo, lunettes. Mais j'avais chaud !!!! surtout autour du cou.

Et puis j'ai bien vu que les femmes iranienne accrochaient leur foulard de plus en plus bas, laissaient dépasser leur longue chevelure sur le dos au delà du foulard...

Remarquez le geste tic des Iraniennes : elles attrapent leur foulard et le remettent plus haut sur la tête, parce que le foulard est posé vraiment bien en arrière des cheveux, et souvent... il tombe ! Signe de révolte !!!

Et puis elles se maquillent, très fort, les yeux surtout, parfois avec un liner qui monte sur les côtés comme dans les années 60, beaucoup les sourcils, exagéré, et elles portent des faux cils.

Les femmes m'ont dit : "The only problem is "the cover" !"

Bien sûr j'ai vu énormément de femmes portant le chador noir, je ne peux pas le nier.

Et dans certaines familles où nous avons été invitées, nous avons dû garder le foulard à l'intérieur parce que la famille était très religieuse et qu'il y avait "des hommes", et nous rhabiller complètement pour aller aux toilettes au lever du lit quand nous avons été hébergées.

Le foulard, vous avez dit ?

Nous avons voyagé en train de nuit. On s'est retrouvé dans un compartiment mixte ! Nous avions acheté nos billets pour une voiture réservée aux femmes, ce qui paraissait évident. Une fois dans notre compartiment nous avons vu arriver un homme : "it's my husband" nous dit la femme. Puis un autre homme : "it's my son". Puis un autre homme, ni mari, ni fils... Nous étions dans un compartiment mixte ! On a su par la suite que pour être dans un compartiment de femmes, il faut le demander expressément. La fille à l'agence n'avait pas dû comprendre. Pour nous, cela semblait une évidence.

La femme iranienne a aussitôt enlevé son foulard, nous de même. Lorsque la porte du compartiment s'ouvrait (contrôleur, service de restauration), on remettait à toute vitesse notre foulard et dès qu'elle se refermait on le retirait...

Nous avons donc dormi en promiscuité en compagnie d'hommes que nous ne connaissions pas.

Et l'ambiance a été top.

Mais il n'y a pas que le foulard

Il y a la manque de liberté de choix, de la femme. On m'a expliqué que le seul moyen pour une jeune femme de s'émanciper de sa famille est par le mariage. Une fois mariée, elle a le droit de divorcer, mais dans le partage des biens, c'est le mari qui reçoit presque tout. Elle doit chercher du travail, ce qui n'est pas tâche facile non plus dans ce pays.

On a rencontré des avis divers

On a discuté avec de très nombreuses personnes. Certains n'en peuvent plus du régime. Certains l'encensent. Je pense que le changement n'est pas pour les années proches, car un changement brutal, à mon avis, entrainerait une guerre civile ou pire, car les gens ne sont pas tous d'accord.

Si le président actuel Hassan Rohani est considéré comme "plus modéré" que ses prédécesseurs (il ne faut pas omettre qu'il n'a été élu seulement qu'à 50,7 % des suffrages), il ne faut pas oublier que la politique de l'Iran se déroule dans le cadre d'une république théocratique islamique et qu'à la tête du pays ce n'est pas le président, mais se trouve le "Guide Suprême", l'autorité religieuse suprême, guide de la révolution, et chef de l'État, premier personnage du régime. Il est au dessus du président qui est "sous sa responsabilité".

A l'heure actuelle le rôle de guide suprême est tenu par l'Ayatollah Ali Khamenei, élu en 1981, réélu en 1985, nommé à vie depuis la mort de l'Ayatollah Khomeini en 1989, c'est à dire.... depuis.... 27 ans !