KHORAT - PIMAI

De Phitsalunok à Khorat

Lundi 12 Août 1974

Nous quittons Phitsalunok. Nous sommes d'abord aller visiter un temple où nous assistons à des danses religieuses, pas touristiques.

Voiture en panne

Au bout de 50 km de route, on a une panne. le moteur, et en plus on a un pneu crevé. On est bloqué ! On crève de chaleur sous un soleil qui, ici, tape dur. On est en pleine nature. Les voitures que cette route sont très rares. On commence par changer le pneu.

Puis on pousse la voiture, et on s'aperçoit que le deuxième pneu, lui aussi, est dégonflé. On essaye alors de pousser la voiture en sens inverse, dans la descente. On lui fait faire un demi tour, et on pousse. dans la descente, la voiture est entraînée et prend de la vitesse. On saute alors en marche, tous dedans.Mais dès que la route se remet à grimper, c'est fini, tout se bloque à nouveau. Alors on recommence la même opération plusieurs fois. On descend en marche dès qu'on sent la voiture ralentir, on se met tous à pousser, et dès que la voiture repart, on saute tous dedans.

Mais on n'arrivera jamais ainsi à faire les 50 km qui nous séparent de Phitsalunok ! Et voilà, c'est l'arrêt complet.

Remorqués par un minibus

Enfin, passe un minibus conduit par des commerçants chinois (on les reconnaît bien maintenant les Chinois avec leurs yeux étirés très différents des grands yeux des Thaïs). Contre une certaine somme d'argent, bien sûr, ils acceptent de nous tirer avec une corde jusqu'à Phitsalunok.

Cela marche très bien, on prend de la vitesse. Et puis, crac, la corde casse. on répare et on se relance. On arrive même à faire jusqu'à du 100 km à l'heure, et à doubler d'autres voitures.

A Phitsalunok, on laisse la voiture pour qu'elle soit réparée. On retourne à l'hôtel où l'on déjeune. Cette aventure nous avait mis en appétit ! On choisit un repas copieux sur la carte, mais qui ne revient pas plus cher, comme tous les autres, 10 FF environ.

Somsak nous retrouve et nous explique qu'il faut laisser ici la voiture ainsi que notre chauffeur Somsak 2, car il faut trois jours pour réparer, et que la réparation va coûter 3000 bahts. Alors Somsak a téléphoné au siège de Jumbo à Bangkok, pour qu'on nous envoie une autre voiture et un autre chauffeur à Khorat. On rejoindra Khorat par un bus, qu'ils vient de louer.

On abandonne donc Somsak 2, notre chauffeur, avec tristesse, avec de grosses bises qui le font rougir, car évidemment ce n'est pas dans les coutumes thaïes.

A 14 hres, l'après-midi, on quitte l'hôtel. On prend le minibus de l'hôtel qui nous conduit jusqu'à l'arrêt des bus, et c'est là qu'on a loué, un gros gros bus... pour huit !

Un gros gros bus... pour huit !

Nous avons une banquette entière pour chacun d'entre nous, alors qu'elle est faite pour trois Thaïs. Et il y a des ventilateurs tournants au plafond du bus.

Au début tout va bien. On refait nos 50 km. On reconnaît les lieux et l'endroit où on est tombé en panne. Puis on grimpe vers la montagne, on surplombe la vallée. Le paysage est très beau.

On traverse ensuite des collines boisées à la végétation très serrée. On grimpe, on grimpe dans la montagne, de 500 à 1700 m. Il y a de temps en temps des petites maisons au creux des collines. la route serpente (j'ai mal au coeur !) Les paysages de montagne sont magnifiques. Puis c'est la route toboggan. On ne serpente plus, mais on monte et on descend. On ne s'arrête qu'à des postes à essence où l'on cherche un peu d'eau pour se laver, enfin, on est lavé, mais c'est qu'on se sent crasseux.

Et puis la route n'en finit plus. Le voyage semble interminable. La nuit tombe. On essaye de passer le temps par des jeux. On dort. On a froid. Et tout le trajet est accompagné par le klaxon du chauffeur du bus, qui n'en finit pas. Insupportable cette manie.

KHORAT

On arrive crevés et dégueulasses à Khorat. Il est 21 hres.
On laisse le car pour prendre un taxi collectif, et on y charge les bagages. Il nous conduit jusqu'à l'hôtel.

Dans un hôtel de passe !

Sri Pattana Hotel
346 Suranaree Road

De l'extérieur, le Sri Patana Hotel a l'air d'un palace.
Mais l'intérieur... On a appris en Thaïlande à ne pas se fier à l'extérieur des hôtels, car souvent on a déchanté.

Jusqu'à la chambre ça va. L'hôtel ne parait pas tout neuf. La salle de bain n'est pas terminée d'être repeinte... A propos je découvre seulement aujourd'hui que les paires de tongs que l'on trouvait dans toutes les chambres des hôtels, et que nous pensions avoir été oubliées par des clients, sont en fait laissées par l'hôtel pour... aller dans la salle de bain...

Nous nous précipitons sous la douche. Il me faut me laver deux fois car un seul lavage n'est pas suffisant pour effacer la crasse. Je me lave aussi les cheveux, car je me sens crasseuse de la tête aux pieds. Et les vêtements ! n'en parlons pas !... L'eau est d'une couleur !

Et c'est les cheveux encore sous la mousse, que j'entends Anita me dire que tout le monde est déjà en bas au restaurant. Je me dépêche alors. Il faut bien que je sèche un peu mes cheveux, car, avec l'air conditionné ce sera la crève à coup sûr.

Henri vient nous chercher. Il nous explique qu'il a préféré venir nous chercher parce que le restaurant... est un bar à filles, et l'hôtel... un hôtel à prostituées. Bien sûr, tout cela bien organisé par les Américains. Nous prenons donc l'ascenseur ensemble.

Au restaurant, quel spectacle ! Comme dans les films américains. On est les seuls à manger autour d'une grande table.
Ici, c'est Pigalle ! Et les Américains qui sont là, c'est plutôt la déchéance.

On va se coucher immédiatement après le repas.
Un coup de téléphone des gars : "Regardez vos draps" nous disent ils. Des taches, des trous...

Ensuite, nous entendons du bruit autour de notre chambre. Nous ne nous sentons pas très tranquilles.
Alors nous décidons de mettre une chaise devant la porte. Si quelqu'un rentre, elle tombera !

_____ Deuxième jour _____

Mardi 13 Août 1974

Nous étions prêts à 9 hres, mais la voiture envoyée par Jumbo de Bangkok, elle, n'était pas arrivée (270 km).
Sans moyen de transport, nous ne pouvions pas partir pour Phimai...


Une ville faite pour les Américains

Alors, nous décidons d'aller nous promener dans la ville de Khorat. Nous prenons quatre samlos que Somsak bien sûr arrive à négocier à un prix correct, et nous partons à la queue le leu vers le centre ville.

La ville de Khorat est très sale et rappelle les villes indiennes à ce point de vue. L'air est très humide (évidemment humidité et saleté vont de paire, et la saleté colle à la peau.). Et il y a constamment du vent qui souffle.

La ville est à l'heure américaine. C'est une ville faite par et pour les Américains. On y trouve tout ce qu'ils pourraient avoir besoin pour ne pas être dépaysés : leurs chemises bariolées, leurs pantalons à revers, évidemment faits à leurs tailles, leurs disques, et même il y avait ce matin sur la carte du petit déjeuner, leurs fameuses pancakes accompagnées de sirop d'érable ! Dans les boutiques, les juke boxes diffusent de la musique américaine.

Nous voulons changer de l'argent. Nous rencontrons quelques problèmes : l'Asia Bank ne change pas les "currency" et nous avons des traveller cheques. On nous envoie vers une banque chinoise. Ici, beaucoup de banques sont chinoises, les Chinois étant très nombreux dans la région (et on les reconnaît bien). C'est très compliqué, il faut remplir des tas de papiers, le guichetier va, ensuite, demander l'accord de payer à son supérieur, qui étudie très sérieusement le passeport et le traveller cheque. A côté de nous, une femme ne sait pas signer, et on lui fait imprimer son empreinte au bas du document.

Ensuite, pour changer des billets, c'est pas à la banque, mais il nous faut aller chez le bijoutier !

Khorat est aussi une ville où les bijoutiers pullulent (évidemment pour les cadeaux que les Américains font à leurs petite amie). Et c'est chez les bijoutiers que se trouvent les money changers.

Il y a aussi dans la ville un bureau des visas (?). La base américaine, elle, se trouve, peut être à 200 km de la ville.

Nous allons ensuite dans le marché où les odeurs de poisson séché sont toujours aussi insupportables, mais où je fais quelques bonnes photos.Puis nous rentrons à pied à l'hôtel, ce n'était pas si loin.

Et à l'hôtel, on attend toujours la voiture, qui, paraît-il, est partie de Bangkok depuis 8 hres ! On essaye de passer le temps en jouant aux échecs. La voiture arrive à midi. Il lui a fallu quatre heures pour faire 270 km ! On regrette notre chauffeur Somsak.

Nous allons aussitôt déjeuner dans un restaurant de la ville, ou plutôt une gargote de la ville. La nourriture n'est pas formidable et les verres, les plats sont recouverts d'une couche de crasse. Chacun essuie du mieux possible, mais... ça tient la crasse...


Le temple de Phimai

Nous arrivons quand même à partir pour Phimai. La voiture est une vraie trottinette. Ou plutôt le chauffeur la conduit ainsi. Il ne sait absolument pas conduire. Il fonce, freine, fonce, cale chaque fois qu'il change les vitesses, ne sait pas doubler. C'est très pénible, et nous ne sommes pas rassurés. Somsak 2 prenait des risques sans doute en conduisant, mais il savait, lui, ce qu'il faisait. Celui-ci ne sait absolument pas conduire ! Il nous faut ainsi une heure pour faire 50 km. Pas étonnant qu'il lui ait fallu une matinée pour venir de Bangkok !

Phimai est un petit village groupé autour des ruines. Cela valait la peine d'avoir fait tous ces kilomètres. Evidemment c'est plus facile d'y aller de Bangkok que de Phitsalunok.

Le temple en ruine, et restauré, devait être magnifique. Plus de douves, mais de la pierre, des colonnes, et des frontons sculptés. Et tout cela au milieu de la verdure. Et enfin des ruines pour nous seuls.



Mon voyage en Thaïlande en 1974

■ Le musée

Un peu plus loin nous allons voir le musée : des fragments trouvés, dispersés dans la région.

Là on discute sur l'époque de Phimai, car il est inscrit 11 cent A.D. et comme l'année dernière je mélangeais tout, je croyais que A.D. signifiait "ante deus", et je comprends qu'il s'agit du 11 ème siècle après J.C.

Ce qui nous fait douter c'est l'état des ruines des temples, alors que nos églises du moyen âge se sont si bien conservées. Mais quand je repense à Khajuraho, qui date de la dynastie des Chandellas, 13 ème/14 ème siècle, les temples étaient aussi en décrépitude.

Nous revenons sur Khorat à la même allure de lenteur.

Dîner

Nous avons rendez-vous à 19h 30 pour aller dîner dans un restaurant au bord de l'eau. Restaurant de plein air, j'associe à chaleur étouffante, je mets donc un dos nu, et voilà que justement, il fait très frais, et on caille.

On est les seuls clients du restaurant. La patronne, une prostituée sur le retour d'âge, est toute contente de nous dire qu'elle a fait deux ans de français, mais a... oublié. Elle s'installe à notre table, et nous distribue des sourires. Il y a un juke box qui diffuse de très bons disques (les Carpenters...).

Le repas est mi-thai, mi-occidental. Il est délicieux. Porc frit, beignets de crevettes que l'on trempe dans une sauce sucrée (de l'eau + du sucre + des piments + des oignons), des beignets d'oignons, des oignons que l'on badigeonne de moutarde, et que l'on mange crus, du riz avec du boeuf, une soupe... européenne (du genre poireau/pommes de terre), et du thé... chinois, très clair, que l'on boit dans une minuscule petite tasse, plus petite que nos tasses à moka.

Khorat by night

Il est 21 hres quand nous retournons à l'hôtel. Trop tôt pour aller se coucher. Nous repartons nous promener en ville. Les maisons des esprits sont toutes illuminées, c'est très beau. Il y a un night club toutes les deux portes, et la musique américaine perce dans la rue. (de la bonne musique, il est vrai). Dehors il y a beaucoup de monde. Les mômes nous agrippent : one baht, one baht. Les samlos et les taxis s'arrêtent quand nous passons. dans la rue, nous croisons de grands Américains, accompagnés de toutes petites Thaïes.

Nous repassons devant l'hôtel, mais il est encore trop tôt. Nous continuons à marcher dans l'autre sens.
Puis la pluie se met à tomber. Alors nous rebroussons chemin vers l'hôtel.

Au night club de l'hôtel

Nous avons la curiosité d'aller voir à quoi ressemble le fameux night club super luxe de l'hôtel au 8 ème étage. C'est vraiment le luxe. De la terrasse, on a un panorama sur la ville illuminée. L'entrée du night club, un panneau psychédélique, animé de toutes couleurs. A l'intérieur, il fait un noir complet, les serveurs se déplacent avec des lampes torches. Une lumière rouge éclaire la piste, et ça se trémousse, le jerk à l'américaine, les filles thaïes s'y sont bien mises.

L'ambiance ne nous attire pas particulièrement, et les gars sont écoeurés. Nous allons nous coucher.