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MANAKHA - BAGIL ⇾ BEIT EL FAQUI
Jeudi 15 septembre 1977
On part vers les midi, et encore une fois avec la provision de qât (pour Abdallah le chauffeur). La route descend. On va descendre assez vite, jusqu'au niveau de la mer. On guette avec impatience cette rivière dont nous a parlé François, et qui doit se trouver juste au sortir de Manakha, car la chaleur se fait de plus en plus sentir.
Mais c'est après pas mal de route qu'on la découvre : une magnifique cascade.
La cascade :
On s'arrête. L'accès à la cascade n'est pas facile. Il faut passer par pas mal de gués. Et à certains endroits les pierres sont trop recouvertes par l'eau et on doit se déchausser, et pieds nus les pierres se révèlent être très glissantes. Et c'est comme ça que moi qui suis la première à passer, je me retrouve toute habillée, allongée plouf dans l'eau, retenue par le bras par un sauveteur venu à mon secours. Ce "sauveteur" fait partie d'un groupe de coopérants arabes qui piqueniquaient près de la cascade, faisant cuire du mouton sur un feu de bois.
On fait connaissance (en anglais), ils nous offrent des morceaux de leur mouton... et du whisky de leur gourde...
Bain et toilette dans la cascade, au dépit de la décence.
Le retour par le passage périlleux s'avère plus facile car cette fois je garde mes chaussures pour marcher dans l'eau, tant pis elles seront trempées, mais au moins elles accrochent. Au retour mes vêtements sont presque secs.
Ça descend de plus en plus vers la Tihama. Le nom "Tihama", "hama" ou "hum" signifie "chaleur", ou "pays bas". C'est une bande sablonneuse de 40 à 80 km de large qui borde la mer Rouge. De fortes chaleurs, de 30° à 45°C.
La chaleur est forte, oui. Le vent souffle, mais il est chaud ! On colle dans la voiture.

BAGIL
On peut trouver cette ville aussi sous le nom de Badschil.
Une halte pour prendre un thé dans un petit "café". Une chaleur humide et moite. Peu d'animation.
Une ville triste, à l'approche de laquelle se trouve une usine de cimenterie... Russe !
On fait un tour. Des huttes comme en Afrique, mais entourées de murs, si bien qu'on ne peut rien voir.
Cette région est tournée vers la Mer Rouge et donc vers la Corne de l’Afrique et est marquée par l’influence de la culture africaine jusque dans son architecture ou sa cuisine.
La chaleur et le silence sont juste brisés par le bruit des motos, le moyen de locomotion principal ici.
Vraiment aucun intérêt à rester dans cette ville.
La route traverse ensuite un désert de sable. On s'arrête sur la route pour aller voir un village de cases que l'on a aperçu au loin. On prend des photos. Indifférence complète des gens du village, aboiement des chiens.
Toujours aussi chaud.
BEIT EL FAQUI
(ou Bayt al-Faqih)
Beit El Faqui (ou Bayt al-Faqih) signifie "la maison du lettré". Elle aurait été créée au début du 13 ème siècle par le savant (faqih) Cheik Ahmad Ibn Aujai. Il est enterré dans la ville et vénéré depuis comme un saint. La ville a donc reçu le nom de "Maison des savants".
Logement en funduk
Enfin Beit el Faqui. On cherche le funduk. Les indications sont contradictoires. On va d'abord au centre, puis on nous renvoie vers l'entrée du village. Et il faut bien admettre que ce que l'on nous a indiqué est un funduk !... Parce que des lits de corde tressée sont disposés dehors.
Il y en en fait deux, trois funduks qui sont accolés. On va les voir. Ils sont tous pareils.
Donc, une pièce sans fenêtre au rez de chaussée avec une porte, et où on crève de chaleur et de manque d'air, ou alors les lits dehors, en bordure de la route... Mais si on dort dehors, on met les bagages où, en sécurité ?
Le tarif est de 2 rials par lit. Ça c'est bien un funduk yéménite, et pas pour touristes...
Mais Myriam a une bonne idée, elle demande s'il n'y a pas de terrasse. Eh oui, un escalier conduit à une terrasse. On sera à l'aise là-haut. Seuls, en plein air, sur un endroit propre, et personne ne viendra voler nos bagages. C'est décidé, on montera les matelas sur la terrasse.
Evidemment dans ce genre de funduk il n'y a pas d'eau, et les WC sont dans la nature.
On cherche à manger, et surtout à boire car les gourdes sont vides, avec cette chaleur ! On n'a trouvé aucun point d'eau depuis la cascade. Une boutique au village veut bien nous préparer à manger. On remplit les gourdes avec du "Miranda Orange" qui est... chaud. C'est ce qu'il y a de plus dégueulasse, mais on n'a que ça à boire.
Le repas
Une boite d'haricots blancs épicés + un peu de sauce tomate et un oeuf mélangé là dedans. Pour un prix je crois de 3 rials.
On a un gros morceau de pain pour manger, car il n'y a pas de couverts. Ce n'est pas facile ! Mais nous, on a nos couverts de camping, matériel de tout voyageur, heureusement, car ce n'est pas facile de manger des haricots avec une miche de pain.

Il ne reste rien d'autre à faire qu'à aller se coucher. Il n'est pourtant que 19h 30. A l'assaut de la terrasse...
On y trouve les matelas déjà installés les uns à côté des autres, un véritable dortoir. Le pire, c'est que cette fois, on doit se taper Abdallah avec nous dans le dortoir !
Il fait chaud, mais le vent souffle. On asperge nos matelas de poudre anti-puces, c'est la première fois qu'on le fait. Mais on est bien content de l'avoir emporté. Un drap de couchage suffit, et je supporte quand même un chemisier à manches courtes. Je m'enduis de repellent contre les moustiques, car en plein air, et dans la Tihama, on ne sait jamais.
Et on essaye de dormir, avec les boules Quies, bien entendu, mais en vain, car on est en bord de route dirai-je... "nationale", et les motos tonitruantes ne cessent de passer. Entre le vent qui souffle, et le bruit des motos, on met des heures à s'endormir. Et ça remue dans les sacs à viande ! En désespoir de cause, je prends un somnifère.Très efficace, chose à emporter en voyage, tout comme les boules Quies.
Vendredi 16 septembre 1977
Matin à Beit el Faqui

Notre "chambre" sur la terrasse du funduk
Le temps de ranger les affaires et on aperçoit deux Toyotas sur la route. Eh bien c'est le groupe organisé de Nouvelles Frontières qui était dans le même avion de Paris que nous. De la terrasse on leur fait de grands signes. On apprendra par la suite qu'eux, ils ont dormi dans un champ. Ce rassemblement n'est pas tout à fait un concours de circonstances, car, eux comme nous, nous avions envisagé d'être à Beit el Faqui le vendredi, parce que c'est jour de marché, et c'est l'un des plus importants marchés de la région. On nous avait dit, malheureusement, que justement il n'y aurait pas de marché aujourd'hui, à cause des fêtes de la fin du Ramadan, mais on a voulu quand même tenter notre chance.
Le problème à résoudre maintenant c'est le café du matin. Je demande à tout hasard à un homme du funduk, s'il y a "maya marlea sokhun", ça veut dire "eau chaude bouillie". Et en une minute il m'apporte un verre d'eau chaude. Et je peux préparer mon Nescafé (emporté de France...) Et du coup, je suis la seule à avoir eu mon café.
Un tour de la ville
On part à pied vers la ville, et on donne rendez-vous à Abdallah au centre ville. On retrouve là-bas le groupe Nouvelles Frontières, ils sont en train de prendre leur thé. On échange nos souvenirs de voyage. On prend notre thé ensemble, et il y a du bon pain tout frais que l'on tartine de "golden syrup".
On va visiter la ville. Il y a tout de même un rassemblement de marchands assez important. C'est très animé, plein de gens pittoresques, et il y a un marché au bétail fantastique, dromadaires et chèvres. On passe la matinée à déambuler dans ces ruelles si passionnantes.
Le problème c'est encore de trouver à boire, et frais si possible, car la gourde est à sec. Entre les "mixed fruit can" et les "Canada dry" et les "Miranda Orange"... pas d'eau minérale ! Ici, on vend de l'eau, dans des bidons. L'eau est fraîche et j'en achète, 1/2 rial, pour remplir ma gourde.
On quitte Beit el Faqui à 13 hres en direction de Zebib, qui n'est pas très loin.