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GONDAR (3 nuits)

Jour 4 - Vendredi 10 Avril 1981


De Bahar Dar à Gondar

On a pris l'avion. En vol nous avons eu un joli spectacle. On a survolé le Lac Tana. On a très bien vu la presqu'île de Zeghie et l'île de Dek, l'île la plus grande au milieu du lac.

L'aéroport de Gondar est moins typique que celui de Bahar Dar, non situé en plein centre comme ce dernier. Mais encore ici c'est une piste d'atterrissage en terre battue.

En prime, nous avons eu droit à l'arrivée à Gondar au discours du steward, sans micro. Il s'est placé au milieu de nous, et nous a dit "Mesdames, Messieurs, nous espérons que vous avez passé un agréable voyage, nous espérons vous revoir bientôt sur Éthiopien Airlines (in english...).

GONDAR

Gondar est au nord du lac Tana et au sud du massif du Simien.
La ville est bâtie sur les contreforts du massif du Simien, à 2 200 m d'altitude

C'est l'ancienne capitale de l'Ethiopie. Ses châteaux, ses églises et ses palais, témoignent de la splendeur passée de l'ancienne capitale de l'empire abyssin. Elle demeura capitale du royaume éthiopien jusqu’au 19 ème siècle.


La ville a été fondée en 1636 après le départ des Portugais par le roi Fasiladas (1603-1667). Elle était au carrefour de plusieurs voies stratégiques pour le royaume éthiopien. L'endroit a été choisi parce que c'était une région fertile, il y a de l'eau venant des montagnes, et venant d'un lac.

Fasilidas proclama solennellement le retour à la foi ancienne, puis fit expulser les jésuites perturbateurs du règne de son père qui est mort peu après.

Fasilidas va être le premier d'une lignée de fastueux constructeurs, et le protecteur de l'Église éthiopienne.

gondar-dynastie


Terrara Hotel
Il est situé sur la colline Terrara,
tout près du principal ensemble des châteaux.
La salle de bain et les WC... à l'étage.

Cet hôtel s'appelait avant, "Itegue Menen Hotel", débaptisé depuis, car c'était le nom de la femme d'Haïlé Sélassié.
Il a pris le nom de la colline où il est situé.


La cité royale est entourée d’une grande enceinte fortifiée à l’intérieur de laquelle se trouvent plusieurs châteaux en pierre d’inspiration européenne : portugaise pour les méthodes de construction et italienne pour l’architecture.

La ville est encore chargée d’histoire. On peut y voir plusieurs châteaux construits par plusieurs rois éthiopiens illustres : Fasiladas (empereur de 1632 à 1667), Yohannes 1er (empereur de 1667 à 1682), et Iyasou 1er (empereur de 1682 à 1706).

Elle comprend également les Bains de Fasiladas, un endroit superbe qui fut un lieu de villégiature pour les rois éthiopiens, ainsi que plusieurs églises illustres dans l’histoire de l’église orthodoxe éthiopienne.

Elle fut aussi influencée par les cultures indienne et arabe. C’est l'un des sites les plus étonnants d’Ethiopie.

Sitôt posés les bagages à l'hôtel nous partons à pied faire la visite du premier groupe de châteaux, le "Royal Compound", qui se trouve à la sortie de l'hôtel, en pleine ville.



gondar


Petite déception : moi qui avais vu des photos des châteaux au milieu des collines vertes rappelant l'Angleterre, je vois les châteaux au milieu de collines jaunes, aux couleurs de la fin de l'été, du début de l'automne.
C'est différent mais ça a son charme.

A visiter :

- Les ruines de château des rois Fasilidas, du roi Bakaffaet, de la reine Mentuab
- Les fresques de l'église de Debre Berhan
- Les ruines de l'abbaye de Qusquam

L'enceinte crénelée qui enveloppe la majeure partie des palais mesure 2 km de long. Elle était percée de 12 portes.



gondar-les rois
Reconstitution de la cité impériale de Gondar



LE CHÂTEAU DE FASILIDAS

Le Palais de Fasilidas fut le premier construit en 1635. C'est un singulier mélange de traditions mongole, indienne et portugaise (les Portugais étaient à Goa en Inde).

Haute tour conique, quatre étages, créneaux.
Sur le donjon, entouré d'un balcon de bois, on peut voir la loggia d'où le souverain se montrait à son peuple.

- La bibliothèque : Livres d'Émilie Dickinson, Histoire du jazz, Art Hindou. Il y avait plein d'étudiants.

- La salle à manger, immense, longue et étroite. Le toit a brûlé en 1881, et restauré.

- La ménagerie : Derrière les cages un lion, et dans l'autre cage, une lionne.

- Les bains, le hammam : La vapeur était fournie par une eau qui bouillait sur le feu ou de l'eau versée sur des roches brûlantes. On utilisait aussi le hammam comme un hôpital. Les fenêtres étaient fermées et on utilisait des bougies pour éclairer le bain. Le toit est original, il n'a pas été détruit.

- La maison du roi David III : C'est le frère de Bakalfa. C'était un musicien. Il vécut à une époque de famine et de maladie.

Retour à l'hôtel

Retour à l'hôtel pour le déjeuner, par le grand escalier où prône le portrait du "Comrad Chairman Mengistu Haïlé Mariam".


soupe aux lentilles
spaghettis en entrée
viande
pommes de terre
orange en dessert


Après-midi : Visite du palais de QUSQUAM de la reine MENTUAB


La ville royale de QUSQUAM a été construite par la Reine MENTUAB (1706-1773), dans un site qui surplombe l'ancienne capitale. Mentuab, une reine très belle, nommée de son nom d'impératrice "BEHRAN MOGASA" après la mort de son mari BAKALFA.

La reine Mentuab abandonna le château de son mari pour venir s'installer à QUSQUAM. Ce fut la résidence de la reine jusqu'à sa mort, avec une chapelle annexée.

Une église-monastère était accolée à la demeure, celle de la colline DEBRA TSAHAI (montagne du soleil). L'abbaye était destinée à reproduire les souvenirs de la Sainte-Famille lors de la fuite en Égypte. Ce fut avec l'église de Bethléem en Gayent, l'une des premières églises rondes à toit conique et galeries circulaires. L'église a brûlé, et a été restaurée.


Tout cela est fort ruiné mais dans un cadre boisé c'est un ensemble qui demeure fort subjectif.
Le palais de Qusquam n'a plus de toit, il y a l'église, une salle à manger décorée extérieurement de lions et d'éléphants.


Le centre artisanal

Nous allons voir le centre artisanal où quelques cartes postales acceptables sont au prix le moins cher que l'on ait trouvé : 30 Birrs. Il y a aussi des foulards de soie retraçant la vie de la reine de Saba pour 16 Birrs.

J'en profite pour essayer de trouver un cordonnier car j'ai un problème de chaussures, déjà !... le talon de mes Clarks joue des castagnettes. Bon, se faire coller un talon en amharique ce n'est quand même pas très difficile.

En attendant que la colle prenne, le cordonnier nous fait nous asseoir et s'essaye dans ses souvenirs d'italien. Plus on va vers le nord du pays, plus on parle Italien, souvenir de l'invasion italienne de Mussolini...

Un cours d'amharique

Ce cordonnier fut notre premier professeur d'amharique...

"Bonjour" : Indemin Aderu, Indemin Walu, Indemin Ameshu...
Parce que c'est comme en anglais, le matin / l'après-midi / le soir.

Mais alors les sonorités et la longueur des mots !!! Ça sonne tout presque pareil, et pour ne pas confondre les trois !

Le mieux c'est encore "Merci" ce mot si simple et si court se dit tout simplement :
"ZIERESTELIGN" en roulant les "R".

"Au revoir" c'est facile : "DANOAL".

Tout ça se mélangeant avec "Ciao", "Quanto", "Dove Francia ?", "Francia vicino à Italia ?"...
Notre cordonnier est ravi, la France, l'Italie, ah oui c'est la même chose... !


Acheter des timbres à la poste de Gondar

Savez-vous que pour acheter des timbres il faut être fouillé, et cela ne suffisait pas au militaire qui faisait la garde : il exige qu'on laisse tous nos sacs à la porte y compris celui qui contient le porte-monnaie. Alors de crainte, l'une d'entre nous fait la surveillance du porte-monnaie, et l'autre va acheter les timbres. Peine perdue, la poste est fermée !

L'explication de tout cela, c'est que Gondar est particulièrement une ville très stricte et pointilleuse. Gondar a subi une terreur rouge très dure pendant la révolution. Et le représentant du pouvoir actuellement est un ami personnel de Mengistu, et il en fait un peu trop question propagande et fidélité au pouvoir. D'où toute cette surveillance.

Nous repartons en visite avec le car pour voir l'un des plus beaux monuments de Gondar.


L'église DEBRÉ BERHAN SÉLASSIÉ

L’église Debré Berhan Sélassié ("Lumière de la Sainte Trinité") est l'un des lieux importants de la ville.
Elle est située en hauteur sur le sommet d’une petite montagne et domine la cité royale.

C'est Iyassou Ier le Grand qui, à la fin du 17 ème siècle, fonda l'abbaye Debré Berhan Sélassié. La dédicace a été célébrée pour l'épiphanie en 1694. Elle est entourée de remparts : 12 tours représentant les 12 apôtres.

Elle contient de nombreuses fresques peintes anciennes retraçant la vie de Jésus et l’histoire de la Sainte Trinité.
Le plafond, peint de têtes d’anges protecteurs regardant dans les quatre directions, est d’une grande beauté.

Elle est toujours l’objet par les Ethiopiens d’une grande vénération.



On y entre par un porche ouvert sur une enceinte. C'est une construction très classique, une sorte de grande salle quadrangulaire entourée d'un corridor couvert. Iyassou y avait fait le don d'une riche cloche de bronze venue des Indes néerlandaises. C'est là une exception notable car les églises d'Éthiopie n'ont pour cloches que des pierres en phonolite, une roche sonore.

Le trésor de cette église n'est plus là. Il a été emportée par Théodoros et ne fut jamais retrouvé.

À l'intérieur :

L'intérieur est captivant par le très riche décor peint aux 17e et 18e siècles et soigneusement entretenu.
Les peintures ont été faites par un artiste qui se nomme HAIELE MESKALE. Les couleurs sont faites avec des feuilles et des pierres. Les peintures ont été faites sur des toiles marouflées. On a tendu une toile sur le mur et on a peint sur la toile.

⇾ Le plafond avec les têtes de chérubins : il y en a 12, de chaque tribu (des 12 tribus ce qui est en fait 144). Ce sont les têtes des tribus sauvées à l'Apocalypse.

⇾ Les murs peints couvrant toutes les parois de haut en bas sont des scènes diverses de la vie du Christ, du Nouveau Testament, et aussi des légendes locales.

Au fond le père, le fils, et le Saint Esprit.
Représentation de la crucifixion et de la nativité.
Sur le mur de droite : le chemin de croix.
Au-dessus de la porte d'entrée : la vierge.
Dans le mur de gauche : en haut la naissance du Christ et la persécution par Hérode,
la fuite en Égypte.
Troisième ligne : les croisés et l'Assomption.


Retour à l'hôtel

On lâche le car en ville et on remonte à pied au travers de la ville et du château.
Une remarque : Gondar est une ville avec l'électricité.

Dîner

Soupe
côtelettes de mouton
carottes (exquises)
pommes de terre sautées (exquises)
orange


Jour 5 - Samedi 11 Avril 1981

Excursion à KOSSOGE

(Point de vue sur les montagnes du Simien (enfin, l'amorce du Simien) à environ 30 km au nord de Gondar.

Il est à peu près 8h 30. Et tout le long de la route, on croise des gens, et des gens, qui vont au marché à Gondar.
On est Samedi, grand jour du grand marché hebdomadaire.

Nous nous rendons à quelques kilomètres de Gondar à un point de vue d'où l'on peut voir une structure de relief de montagne déchiquetée analogue au Simien. Magnifique paysage sauvage... malheureusement dans la brume. Au loin une tribu de babouins, des centaines.

Au marché

Au retour nous allons au marché. Je n'ai jamais vu autant de monde dans un marché. Il fait un soleil écrasant. On ne peut pas avancer temps il y a de monde. Il y a plein d'épices et on a la gorge très irritée avec une toux irrésistible et l'envie d'éternuer. Les gens du pays eux-mêmes d'ailleurs sur ce marché ne font que tousser. Ce qui nous fait fuir. Car on est pris de quinte de toux !

Déjeuner à l'hôtel pris sous la tonnelle dans le jardin.


Re-soupe (de poulet)
Re-spaghetti (gâteau de pâtes comme on mange en Grèce)
Steak
Pommes de terre
épinards
salade (on s'en passe)
fruit


Comme tous les jours, il fait très beau le matin et ça se couvre à 13 hres. Comme s'il allait faire de l'orage.


Après-midi

On va voir le panorama sur la ville sur le site du futur Hilton en construction. Y va-t-on pour voir le panorama, ou pour voir le Hilton ? En plus pour grimper là-haut il faut prendre une montée assez dangereuse le long d'un précipice...


Les bains de FASILIDAS


Ils auraient été construits à l'endroit même où l'empereur chassant le buffle aurait rencontré un ermite qui l'aurait incité à fonder ici la cité pour en faire sa capitale.

Au centre d'un grand bassin, un gracieux pavillon à deux étages à fenêtres en plein cintres, à balcons dominant le plan d'eau. Le lieu fut réservé aux divertissements royaux.

Maintenant le bassin est le plus souvent à sec. On prend soin de le remplir pour la Timkat (l'Épiphanie) et il sert alors au renouvellement rituel du baptême par immersion.


Le site est très agréable à cette heure-ci, à 17 hres, la lumière très belle.


L'église GEMGABAT MARIAM

Elle est en pleine ville. Sans intérêt, des peintures modernes.

Au passage, depuis le car, on peut voir dans la ville l'intérieur des maisons, ultra pauvres.

On rentre à l'hôtel en traversant le château.

Le soir, un vent très fort s'est levé.

Et ce soir j'ai de la fièvre 37°8, la conséquence des vitres cassées dans le car.


Jour 6 - Dimanche 12 Avril 1981

Excursion au SIMIEN

Le jour le plus sombre de mon voyage. La fièvre est un peu tombée avec une dose hier soir de Cequinyl. Mais ma crève est maintenant montée au niveau de la gorge et du nez. Grosse dose de médicament… Et ensuite c'est la diarrhée qui s'en est mêlée !

Et pourtant cette journée d'excursion, on a tout fait pour l'avoir. Car ce n'était pas prévu au programme et il a fallu obtenir des tas d'autorisations pour s'y rendre : autorisation de la police de Gondar, autorisation de la police Addis-Abeba, et autorisation de l'agence de voyage.

Normalement c'est une région qui n'est pas ouverte au tourisme. C'est en principe calme.



 Les montagnes du Simien
Les montagnes du Simien (carte postale)

Les monts Simien forment une partie des plateaux d'Éthiopie dans la partie nord du pays, au nord-est de Gondar.

Le parc national du Simien est situé dans la région Amhara et couvre les monts Simien ainsi que le Ras Dashan (4 ème sommet d'Afrique). Il a été créé en 1959 et inscrit en 1978 sur la liste du patrimoine mondial.

Les formes des rochers sont dues à l'érosion.


On a payé 25 birr (environ 70 FF) par personne, en supplément, pour cette excursion. 160 km aller et 160 km retour en plus, location du car, du chauffeur, ce n'était pas prévu. Ce qui fait 1500 FF pour le car entier pour l'excursion, pas donné !



carte

Une région très surveillée !

On a été arrêté à plusieurs barrages gardés par des hommes armés. Et, à un certain barrage, gardé par un superbe Éthiopien au short colonial, boots aux mollets, et fusil de la dernière époque, il fallait en principe donner un mot de passe.

Le commissaire de la région avait dit "je m'y rends demain je préviendrai de votre arrivée, vous n'aurez qu'à dire le mot de passe". Mais voilà que le garde un peu trop zélé exige une autorisation écrite et ne veut rien savoir. Alors notre guide lui montre une autorisation de l'année dernière, concernant le permis de circuler d'un groupe Delta qu'il avait accompagné l'été dernier. Le garde ne savait pas lire : il a pris le papier dans le mauvais sens... Et on est passé !

Alors qu'à Kossoge, hier, on voyait déjà les montagnes déchiquetées du type grand canyon du Colorado, il faut ici parcourir maintenant des kilomètres de plateaux jaunes, pour retrouver ce même paysage.
Au total 3h 30 de route.

On s'est arrêté à plusieurs points de vue d'où l'on voit de magnifiques panoramas. Malheureusement encore, il y avait de la brume. Ce matin tout était couvert et on désespérait. Et puis, ça s'est levé.

On a pique-niqué, et ensuite on a fait une marche dans la montagne d'une heure, et on a traversé un très joli village.
On a attrapé aussi beaucoup de coups de soleil.

Une rencontre surprenante sur la route où l'on marchait à pied. Deux jeeps s'arrêtent brusquement devant nous et en sortent des hommes armés. Tout de même un petit vent d'inquiétude a surgi. Il s'agissait heureusement du commissaire en question, de la région du Simien, celui qui nous avait donné l'autorisation, et qui faisait sa tournée d'inspection.
Notre guide le salue très cordialement et notre accompagnateur est sollicité pour faire un discours de remerciement !

Le retour est un peu dur : diarrhée pressante.
Arrêt de nouveau au point de vue de Kossoge, plus dégagé.

Retour à l'hôtel à 18h 30. Repas frugal.


Le soir

Spectacle de danse. Orchestre : violons, flûte, un gros tambour et un petit tambour.
Danse des épaules. Tous et toutes habillés en blanc (costume typique amharique).
Sonorisation très artisanale de la flûte, un micro qu'on colle sur la flûte, relié à un pavillon des années 1900 !


Les instruments de musique

Le KABARO : tambour qui scande le rythme.
Le OUACHINI : sorte de fifre
La BEGENNA : harpe de 8 à 12 cordes
Le KERAR ou KRA : lire à 5 ou 6 cordes
Le VASSANKO : violon à une seule corde
Boîte en forme de losange sur laquelle est tendue une peau de chèvre
Le MALAKET : sorte de trompette

Vasanko